Le paradoxe des brasseurs amateurs et la vente de leur production ?
Le débat fait rage depuis plusieurs semaines : un brasseur amateur a-t-il le droit de vendre les bières qu’il a produit artisanalement dans sa cave, sa cuisine voire sa salle de bain ?
Selon la loi en vigueur, non !
Selon la Belgian Homebrewers Association, oui…
La loi belge exige en effet toute une série de procédures avant de permettre à un brasseur amateur de vendre le fruit de son travail. Numéro de TVA, accises, AFSCA sont des obligations équivalentes pour tout qui souhaite commercialiser des boissons alcoolisées. A quelques nuances près, il en va de même pour les producteurs de produits de bouche (fromage, miel, chocolat…).
Les brasseurs amateurs sont donc confrontés à un fameux dilemme : vendre leurs produits « sous le manteau » sans rien déclarer ou garder leurs bières pour leur consommation personnelle. Pas certain que la Sécurité sociale voit cette incitation à l’alcoolisme d’un bon œil…
Toute entreprise, peu importe le secteur, vous dira qu’il est essentiel de valider son produit en le confrontant le plus rapidement possible à son marché cible. Autrement dit, il est nécessaire d’obtenir le plus tôt possible l’avis de son futur client afin de valider son intérêt pour le produit développé. La loi en place reviendrait donc à forcer les brasseurs amateurs à se tirer une balle dans le pied. Ils vont dépenser de l’argent, du temps et de l’énergie pour posséder du matériel adéquat, pour se mettre en règle avec la législation, etc. pour finalement peut-être produire une bière…qui ne plaira à personne (à part à papa-maman qui ont goûté tous les échantillons du fils chéri et qui trouvaient ça « vraiment bon »).
A l’heure où le gouvernement belge a trouvé des pistes pour « régulariser » l’économie collaborative (AirBnB et toute la bande), en cette année où les étudiants entrepreneurs ont enfin un statut officiel, ne serait-il pas temps de travailler à un statut de l’artisan amateur ? Cela lui permettrait d’amener une nouvelle énergie, de la créativité, de l’innovation dans des marchés considérés comme saturés mais ouverts aux nouveautés. La loi leur permettrait ainsi de tester leurs produits sur le marché, de valider la demande de clients potentiels et surtout de permettre des premières rentrées d’argent qui seront systématiquement réinvesties dans du matériel et des matières premières.
Consommons local qu’ils disent, favorisons l’entrepreneuriat et la création d’entreprises entend-on. Mesdames, Messieurs les politiciens, puissiez-vous entendre la voix des amateurs de bières regroupés sous la bannière de cette pétition que nous vous invitons à signer…
En attendant, les plans B se mettent en place et un élan de solidarité voit les brasseurs « officiels » proposer aux « amateurs » de mettre à disposition leurs installations histoire d’être temporairement dans les règles pour distribuer le fruit de leur travail. Félicitations à eux.
De notre côté, nous continuerons à offrir un espace d’expression à ces brasseurs le dimanche de Namur Capitale de la Bière (9 juillet) afin qu’ils puissent démontrer au grand public, qu’avec peu de moyens on peut faire de très bonnes choses.
Que ceux qui hésiteraient à goûter une bière brassée dans une baignoire se rassure, nous avons eu l’occasion d’en goûter des dizaines d’excellente qualité. Etre invité comme juré dans un concours (clandestin puisqu’illégal) de bières amateurs nous a fait prendre conscience du savoir-faire de certains. Nous sommes également régulièrement sollicités pour donner notre avis sur des nouveaux produits. Sans concession. Quel plaisir pour les amateurs de bières que nous sommes de pouvoir participer à l’évolution de la peut-être prochaine bière à goûter absolument. Enfin, si la loi le permet…
Emilien & Sébastien, défenseurs des brasseurs amateurs